En 2010, je prends la 6. Comme en 2009, ok.

by M.

Cette nuit, on passe en 2010. Comment ça, "déjà au courant" ?!
Sachez juste que par ici, les métros sont gratuits depuis 17 heures et que certaines lignes élues porteront les fêtards TOUTE la nuit.

Dont la 6, of course.

Juste, soyez sympa, n'essayez pas de passer votre pass navigo devant le tourniquet. C'est GRATUIT, on a dit.

Parce que oui, la foule de gens qui attendent pour rentrer devant chaque station, c'est ça.

À tout à l'heure ?



Papy Funky

by M.

Si la Voyageuse Masquée traîne aussi souvent ses semelles dans la 6, ce n'est pas seulement pour le doux plaisir de se fondre dans la masse voyageuse pleine de curiosités déroutantes. Ce n'est pas non plus juste par amour du wagon brinqueballant joyeusement qui lui secoue la tête comme si elle s'était transformé en mixeur. Mais c'est aussi pour le plaisir grisant de croiser ses héros, devant lesquels elle se sent toute petite, pleine d'admiration, et un peu émue.

Car c'est bien la 6, joyeuse et tremblante d'une excitation mal contenue, qui vous conduira jusqu'à la station Place d'Italie, repaire de l
'un des plus connus de tous les grands de ce monde.
J'ai nommé Papy-Dance, le papy le plus funky de tous les papys.




Ce grand-père rebelle adepte de techno sait bouger
son corps, et il le prouve. Devant le centre commercial Place d'Italie, si vous voyez un attroupement, si vous entendez de la musique, si vous sentez que les gens, tout à coup, s'amusent et se lancent des regards complices... Papy n'est pas loin. Il n'a qu'un ampli, sa musique, et sa dégaine à faire craquer les demoiselles les plus difficiles. On parle de lui ici, et on lui voue un culte à la sauce Facebook . C'est un mythe, il fait rêver, et il survivra à Johnny, parole de Voyageuse. Vous le croiserez en été comme en hiver, et en ce moment, le bonnet de père noël qui clignote en rythme, dans le froid de la nuit tombée beaucoup trop tôt, c'est lui.





La Voyageuse n'a que son clavier d'ordinateur pour vous dire qu'il est épatant.
Lui, il fera mieux, il vous le prouvera :

Faits d'hiver

by M.

Aujourd'hui, 17 décembre, il neige sur la ligne 6 (et accessoirement sur le reste de la capitale).

À 13h26, station Nation, un homme s'installe dans une rame en grommelant. Seul, posé sur son siège comme sur un trône impérial, il fait des variations de voix entrecoupées de rires pleinement satisfaits. La Voyageuse Mas
quée pose sur lui des yeux ronds.

Même rame, quelques minutes plus tard, station Quai de la Gare. Un homme très grand vêtu d'un long manteau noir entre dans le wagon. Il s'adosse contre la barre centrale, en prenant bien soin de la caler juste entre ses omoplates. Un tout petit garçon à la peau chocolatée le regarde faire de tous ses yeux. Puis, sans dire un mot, il lève un doigt pointé vers l'homme jusqu'à
attirer son attention. Alors, tranquillement, l'enfant emmitouflé dirige son index derrière l'homme, désignant le seul siège vide du wagon. L'homme sourit, et décline poliment l'invitation d'un signe de tête. Le train repart.

Deux stations plus loin, alors que le wagon en question est maintenant rempli, un jeune homme retient l'attention de la Voyageuse. Tenant debout avec toute la maladresse du monde, bouche pleine et visage serein de rigueur pour une pause déjeuner, il est penché sur un ouvrage méthodique. Il épluche un oeuf dur. L'étudiant qui lui fait face le dévisage avec des yeux exorbités.


Au regard de ces éléments d'incongruité qui se multiplient, la Voyageuse Masquée émet trois hypothèses :

1. La neige plonge la ligne 6 dans la quatrième dimension, pas de quoi se formaliser.
2. Un film d'art et d'essai était entrain de se tourner à ce moment-même dans la ligne 6. La Voyageuse Masquée sera donc démasquée prochainement sur vos écrans.
3. La fin du monde est réellement imminente.

"C'est pas non plus comme si on était pas prévenus, hein."

Affaires classées

by M.

Pour percer les secrets de la 6, notre agent spéciale la Voyageuse Masquée a dû enquêter... C'était la vérité, et rien que la vérité qu'elle voulait mettre à jour. Elle a été servie. Révélations.

2000 Pour vivre dangereusement, prenez la 6.
L'enquête menée par le parisien révèle un constat qui a de quoi faire frémir les frileux (c'est aussi parce qu'il fait froid, en ce moment) : plus d'une dizaine d'accidents lors du siècle dernier, ont secoué le métro parisien. On parle surtout de déraillement et de collision de rames. De blessés légers, de blessés plus gave et même d'accidents fatals. Ceci dit, sur la ligne 6, les deux drames listés par cet article des plus pertinents sont étrangement similaires :
"18 novembre 1996 : le déraillement de deux wagons sur la ligne 6 du métro à la station Etoile fait deux blessés légers. Un incident du même type s'était produit trois jours plus tôt au même endroit, dans une courbe.
26 décembre 1990 : le déraillement d'une voiture d'un wagon à la station Etoile, ligne 6, fait sept blessés légers."
Vous savez maintenant quelle station éviter. Merci, Voyageuse Masquée.
Le même quotidien nous parle également, la même année, de l'effroyable phénomène du suicide-au-métro. Âmes sensibles, ou simplement pudiques, s'abstenir.

2001 Les faits parlent d'eux-même

Le Parisien toujours, qui a décidément dû rattacher quelques enquêteurs au dossier CATA (Chocs Avec Transports Accidentés) nous fait cette année-là un rapport bouleversant sur le quotidien des sous-terrains parisiens. Vols, vendeurs à la sauvette, voyageurs énervés, hauts-parleurs bien pensants, accidents pendant les heures de pointe qui empêchent toute compassion... Tout y est. Une fois encore, la ligne 6 est implacablement visée parmi les lignes à risques :
1er constat : Les gens n'y marchent pas correctement.
Et en plus, ils ne se parlent pas.

"GLACIÈRE, LIGNE 6 8 h 30, l'heure de pointe. C'est le défilé des cartes orange et des fraudeurs au portillon. On passe dessus ou dessous. Le métro arrive bondé. Une jeune femme tombe à l'ouverture des portes. Elle tente de s'en prendre à un autre voyageur, mais déjà le métro repart. Deux stations plus loin, à Denfert-Rochereau, les quais débordent : près de 500 personnes se regardent dans un surprenant silence."
2ème constat : On s'y coince les doigts.
GARE-MONTPARNASSE, LIGNE 6 17 heures, un suicide bloque la ligne 4. (...) On pousse pour rentrer dans les voitures. Un voyageur se coince la main lors de l'ouverture d'une des portes. L'homme hurle. Cinq personnes tentent de tirer la porte pour dégager le malheureux voyageur. On tire le signal d'alarme. L'homme s'en sort avec un doigt foulé.

2003 Le voyageur de la ligne 6 est un rustre
Le Parisien semble poser de cette façon la conclusion qu'il préparait visiblement depuis trois ans. Un rustre qui se fiche de l'écologie. Et qui prendrait plutôt sa voiture, s'il le pouvait. Interview à l'appui.

2008 Un corps découvert sur la 6.
Bizarrement, c'est 20 minutes qui en parle.
Un enquêteur du Parisien qui en avait trop découvert ? On ne sonde pas impunément les profondeurs et les mystères de la 6 lorsqu'on n'en est pas un voyageur.
Qu'on se le dise.


La ligne dont vous êtes le héros.

by M.

À la Ratp, on ne fait pas les choses à moitié. Déjà, parce qu'on vous prête une batmobile toujours prête à vous recueillir, où que vous soyez dans la capitale, pour vous propulser là où vous souhaitez atterrir à la vitesse de la lumière (ou pas). La promiscuité en plus. Oui, ça s'appelle le Métro. Mais en plus, on vous demande votre avis. Batman lui-même n'aurait pas pu rêver mieux.
Sur "Vous et la Ratp", donc, on vous donne le pouvoir. On peut y proposer ses idées pour la ligne 6, voter pour celles qu'on défend, y réagir.

Ou se moquer en silence des revendications les plus farfelues en imaginant la tête de Madame Ratp quand elle les lira.


"Bonjour, ma tante est fan de Jeanne Mas,
et je me suis que pour son anniversaire, vous pourriez peut-être..."


En cinq lettres...

by M.

Zone À Risques En Friche ?


Zoom Avant Rire Et Fous-rires ?

Zoo Amical Regroupant Effarouchés et Fêlés ?

Zapping Allègre Rafistolé Expressement mais Fichu ?


Zeste d'Abricot Recuisiné Expédié au Four ?

Pub anonyme

by M.

Il y a quelques jours, dans les couloirs de la station Nation, l'un des terminus de la 6, il s'est passé quelque chose d'incroyable... Après avoir ôté les dizaines d'affiches publicitaires qui nous accueillaient chaque jour en nous promettant un bonheur sans pareil quel que soit notre achat, les petits bras de la ratp nous ont laissé face à des murs gris, nus et sales. Sans sourire hypocrite ni promesses aguicheuses.

Et là...
Au fil de cette toute petite semaine sans pub, chaque carré gris est devenu le terrain de jeu d'un voyageur de la 6. Ceux qui, dirait-on, se taisent dans l'indifférence froide et inexpressive du métro ont enfin parlé.



Sur la 6, en réalité, on s'exprime tous les jours, mais chhhhut...

Beware... the 6 is alive.

by M.

Ce matin-là, sur la ligne 6, notre envoyée spéciale (nom de code : Voyageuse Masquée) grimpait négligemment dans une rame qui l'attendait, sur le quai de Place d'Italie. La Voyageuse, à qui il arrive de papoter (QUI a dit "euphémisme"?!) prévient gentiment le portable collé à son oreille que "ça risque de couper, chuis dans l'métro". Le signal sonore vient ponctuer ces sages paroles, comme un ronron admis par tous les voyageurs qui ne l'entendent, semble-t-il, même plus.


À cet instant précis, juste derrière elle, des cris rauques. Un grognement. Une suite de paroles incompréhensibles, prononcées d'une voix sourde, assez forte pour que chacun réalise qu'il s'agit d'injures. Regards gênés dans la 6. La Voyageuse ne s'est pas retournée. Elle croise si souvent des gens bizarres, au sein de la cinquième dimension qu'est le métro, qu'elle s'est un peu entraînée à ne plus y prêter une attention démesurée. De peur de se faire définitivement happer par ce monde parallèle, sans doute.

Mais le métro ne démarre pas. Les gens autour d'elle s'agitent, ne se cachent plus . Cette jeune fille blonde, juste devant, se contorsionne pour apercevoir l'homme qui hurle maintenant, visiblement agacée que notre agent l'empêche d'avoir pleine vue sur le spectacle.
N'y tenant plus, la Voyageuse fait volte face.

Juste derrière elle, il est là, de toute sa grande taille, debout à l'intérieur du métro si ce n'est qu'il a...
la tête prise entre les portes entrouvertes. À l'extérieur. Et qui injurie, c'est désormais clair, le chauffeur.

"Bougre de gredin ! Mille-pattes enfariné ! Sac à semoule qui sent des pieds ! Tubercule à lunettes !"

(afin de ne pas choquer les plus jeunes lecteurs, et dans le soucis de préserver vos âmes innocentes, certaines des paroles ci-dessus rapportées ont été légèrement modifiées, ndlr)

Un voyageur éberlué a alors refermé sa bouche bée, s'est approché de ce magicien à la tête volante (pour les gens du quai) ou au corps sans tête (pour les voyageurs) et l'a aidé à rouvrir les portes. Capitaine Haddock est rapidement redevenu un voyageur comme les autres (en continuant cependant à grogner un peu sur trois stations), et la vie de la 6 a repris son cours.

Mais aujourd'hui encore, une question plane...


Comment peut-on se faire manger la tête par des portes
en entrant simplement dans un métro..?


Le mystère reste entier.

Et entre deux injures, il se dit
qu'il n'avait jamais observé si longtemps une chaussure de femme.


L'automne...

by M.

... ne peut pas s'empêcher d'être partout
(ici, station Saint Jacques).

En toute discrétion, bien sûr.




Indélébile a encore frappé.

by M.

Vous connaissez Indélébile ? Il est la terreur des afficheurs. C'est lui qui, au détour d'un couloir, ou entre deux portes de métro ouvertes le temps d'un arrêt, vous saisit d'une phrase bien ajustée. Indélébile hait les affiches bien pensantes, exècre les pubs débilisantes, s'énervent contre les photos retouchées, les slogans consommateurs, les couleurs criardes, les filles aux dents trop blanches. Indélébile travaille dans l'ombre de l'anonymat, mais c'est quotidiennement que sa célébrité éclate...

Ce matin-là, c'est sur la 6 que la fibre féministe d'Indélébile s'est manifestée.
(attention, photo exclusive car cette œuvre a été aussitôt recouverte par les petits bras de la RATP, ndlr)


Les passages de l'ombre

by M.

Vous qui prenez le métro tel un robot, mécanique, qui n'entendez même plus le long hurlement de la fermeture imminente des portes, vous qui pouvez faire claquer vos semelles à toute vitesse le long de centaines de couloirs identiques en retrouvant d'instinct votre route... Oui, vous qui n'avez même plus à regarder le nom des stations pour savoir où vous vous trouvez : prenez garde.

Car les couloirs de la ligne 6 sont en réalité truffés de vortex spatio-temporels qui engloutissent les distraits.Vous voilà prévenus...

Les pieds de la 6

by M.

La musique du métro, le voyageur de la 6 sait d'où elle vient. Elle rythme ses voyages et couvre même les notes de son mp3. Elle est là, entêtante et omniprésente. Elle fait partie du décors tant que le métro vit, parce que ses musiciens, bien sûr, sont les voyageurs. Ou plutôt leurs semelles. Des bruits de pas discrets au clac-clac assuré, presque arrogant, des pressées qui se perchent sur talons, les bruits de pas ne s'arrêtent qu'une fois les portes fermées, relayés par le train en marche.



Et c'est là que, pourvu qu'on baisse le nez, on peut admirer à loisir les pieds de la 6.


Voici les Pieds de la Semaine.


Il mangeait simplement un petit fromage.

by M.



Et pourtant, derrière ce geste anodin, le vieil homme aperçu jeudi 1er octobre à 14h55 entre les stations Bercy et Denfert-Rochereau portait un message fort.

Croquant goulûment la bûchette telle quelle, sans cérémonie ni tartine, il manifestait en effet sa vive compassion pour les laitiers qui rageaient le mois dernier contre la chute des prix. Pour le passager de la ligne 6 ayant à peine remarqué le désarroi des producteurs au milieu des mauvaises nouvelles, cette déclaration d'amour au fromage (et donc au produit laitier) fut comme un électrochoc.

À chaque bouchée, le visage de l'homme tendu, tout à son ouvrage gustatif, semblait s'écrier :

"Je vous aime nature - même sans pain - et je vous soutiens !".



Photo illustrant l'article d'Ouest-France.


Une belle preuve de solidarité active, exercée avec panache malgré le ballottement du métro.